Hommage à Jean-Paul Corbineau (Tri Yann).

Publié le par Raimbourg Frantz-Minh

Alhambra. Paris. Octobre 2016. (Photo : Frantz-Minh Raimbourg)

Alhambra. Paris. Octobre 2016. (Photo : Frantz-Minh Raimbourg)

Jean-Paul Corbineau, un des trois membres fondateurs du groupe Tri Yann nous a quitté en ce mois de décembre 2022. 
Pour lui rendre hommage, voici la réédition d'un entretien que nous avions eu ensemble à l'Agora d'Evry (Essonne) en octobre 2008. L'article était paru initialement dans la revue Ethnotempos, aujourd'hui le Webzine Rythmes Croisés.
Les albums de TRI YANN ont tous une thématique ?
C'est vrai et cela s'est fait naturellement. Par exemple, le troisième disque ("Suite Gallaise") parle du Pays Gallo, "Belle et Rebelle" a pour sujet la ville de Nantes...
Cependant, on ne peut pas dire que le thème existe forcément dès le départ de la réalisation. C'est au fur et à mesure que l'album se développe qu'une idée globale se dégage. Jean-Louis Jossic qui est comme chacun le sait «la locomotive du groupe», propose une thématique. A partir de là, les musiques, traditionnelles ou celles composées par un des membres du groupe, les arrangements, les paroles vont appuyés l'ambiance générale du disque.
Aviez-vous prévu de faire "Abysses" après "Marines" et ainsi réaliser un dyptique sur la mer ?
Pas tout de suite, mais il est vrai que l'idée est venu assez vite.
"Marines" est un disque sur le dessus de la mer et ce que l'homme perçoit. Quand au dernier ("Abysses"), c'est une sorte d'hymne dédié aux profondeurs de la mer et donc à l'imaginaire...
Certains albums ont des thèmes fictifs et d'autres sont plus basés sur le réel : "Urba" avec des chansons comme Plogoff  est de cela.
Comment vous organisez-vous au moment de la préparation d'un nouvel album ?
Chacun à son rôle.
Il y a d'abord la complicité qui unit Les Trois Jean que nous sommes. C'est notre force et le public nous reconnaît aussi pour cela.
Pour le reste, ce ne sont pas les trois membres fondateurs du groupe qui décident de tout. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a jamais de difficultés, mais chacun vient se greffer autour de l'idée générale pour faire aboutir le projet.
Jean-Louis Jossic donne l'impulsion et nous allons nous greffer dessus, même si nous avons nous aussi nos propres idées.
Jean Chocun a un rôle très important : il est non seulement musicien mais c'est aussi lui qui gère administrativement le groupe.
Mon rôle est quelquefois d'amener des mélodies, Gérard Goron apporte des  rythmiques, des arrangements, Christophe Peloil et Fred Bourgeois s'occupent des choeurs, des harmonisations, Konan Mevel s'affaire autour des percussions, des flûtes et cornemuses tandis que  Jean-Luc Chevalier est le spécialiste des guitares.
Vos chansons ont des thèmes très actuels ?
Nous avons souvent dit dans des entretiens ou ailleurs que «La bergère va de moins en moins aux champs et de plus en plus souvent au Supermarché !».
C'est vraiment la démarche de Tri Yann, nous voulons mettre la chanson et la musique traditionnelle au service de l'actualité. Je pense à des titres comme "Le Soleil est noir" et plus récemment au "Soldat de Sarajevo".
Votre démarche est finalement plutôt rare dans la musique bretonne ?
On nous a suffisamment  reproché de faire des concerts et de vrais spectacles, avec du son, des lumières, des costumes, parfois des décors.  Si Tri Yann existe toujours, c'est peut-être parce que nous sommes un peu à part ! Si nous touchons plusieurs générations, c'est certainement parce que nous avons su chercher le public, le convaincre avec les moyens qui existent maintenant. Cela ne nous a jamais empêché d'être toujours extrêmement sincère dans ce que nous chantons !
Et la danse ?
Nous aimons la danse, cela fait partie intégralement de notre culture  mais ce n'est pas la musique que nous faisons essentiellement. Encore une fois, dès la formation du groupe en 1970 ce que nous aimions était de chanter devant un public qui écoute et ce afin de provoquer une émotion.
Comment choisissez-vous le répertoire de chaque spectacle ?
Après nous avoir tous écouté (rires), c'est finalement Jean-Louis qui décide au final des titres qui seront interprétés.
Il faut trouver l'équilibre entre «les standards», les chansons des derniers albums et puis remettre à la surface des titres plus ou moins connus. Il faut surprendre...
En ce qui concerne les derniers spectacles, c'est la première fois que nous jouons pratiquement la totalité d'un album ("Abysses") sur scène.
Jean-Paul, j'ai envie de vous dire que votre voix est essentielle dans la spécificité de Tri Yann !
Ce que vous me dites me touche énormément ! J'ai eu cette chance inouïe d'avoir des parents, des oncles et tantes qui chantaient pour eux mais aussi pour les autres dans le cadre de chorales, de groupes de musiciens. Je n'ai donc pas beaucoup de mérite...
Au bout de 40 ans de carrière avec le groupe, je suis bien obligé d'avoir conscience d'apporter quelque chose au groupe par ma voix !
Ce que le public ne sait pas forcément, c'est à quel point la gentillesse de tous ceux qui viennent nous voir et m'en parlent me touche et renforce mon envie de faire toujours mieux, de sortir de mes appréhensions. Rien n'est jamais acquis...
                            Propos recueillis par Frantz-Minh Raimbourg en octobre 2008.
Alhambra. Paris. Octobre 2016. (Photos : Frantz-Minh Raimbourg)
Alhambra. Paris. Octobre 2016. (Photos : Frantz-Minh Raimbourg)
Alhambra. Paris. Octobre 2016. (Photos : Frantz-Minh Raimbourg)

Alhambra. Paris. Octobre 2016. (Photos : Frantz-Minh Raimbourg)

Publié dans Folk

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