Las Famatinas et Ninon Valder.
Entretien avec la multi-instrumentiste et chanteuse Ninon Valder à l’occasion de la sortie récente du premier album du Trio Las Famatinas.
Parle-nous de ton parcours musical !
Ninon valder : Je viens d’Albi dans le Tarn. Au départ, je suis flûtiste, c’est l’instrument qui m’accompagne depuis toujours. A l’adolescence, tout en continuant à faire beaucoup de musique classique, j’ai découvert les fêtes traditionnelles occitanes, je me suis investie dans le répertoire traditionnel, j’ai joué dans les bals folk, de la vielle à roue en particulier. Puis, la vie m’a amenée dans d’autres contrées. Le jour où j’ai passé mon Prix de flûte et de musique de chambre à Nantes, un guitariste m’a donné deux disques : un de Mercedes Sosa et un autre d’Astor Piazzolla. Ce fût une sorte de révélation. Je suis venue à Paris, j’ai appris le bandonéon, avec Juan Jose Mosalini, j’ai travaillé autour du tango (Prix de bandonéon au Conservatoire de Gennevilliers), en Angleterre autour du jazz (Master en Jazz Performance de Leeds College of Music), de la musique contemporaine (création de Claire-Mélanie Sinnhuber au festival MUSICA de Strasbourg). J’ai été formé également à l’Ecole Nationale Supérieure Louis Lumière (section son) et au chant par Martina A. Catella*. Petit à petit, je suis revenue aux sources des musiques traditionnelles rurales d’Argentine, et grâce à mon duo « Colacho Brizuela » j’ai pu apprendre « à la source »*. C’est avec ces rythmes, ces chants remplis d’émotions que j’arrive à parler des et aux gens.
Atahualpa Yupanqui et Mercedes Sosa sont deux noms incontournables, les deux véritables ambassadeurs connus de ces musiques ?
NV : Atahualpa a ouvert le chemin où beaucoup d’artistes se sont engagés. Très jeune, il a commencé à parcourir son pays, découvrant la réalité dans laquelle vivait le peuple des campagnes, qu’ils soient indiens ou métis. Dès ses premières compositions, il est devenu le porte-parole de tous ces êtres souvent oubliés, de leurs paysages et de leurs coutumes. Il était également un immense guitariste.
Mercedes Sosa, qu’on appelait « La Negra » a été immensément populaire dans toute l’Amérique latine. Elle s'était d’abord impliquée dans le mouvement nommé « Nuevo Cancionero », puis elle a interprété d'innombrables chansons issues du folklore ou des compositions plus récentes. En toute modestie, nous souhaitons être les héritières de sa pensée musicale.
Comment Las Famatinas a été créé ?
NV : Le Trio est né en juillet 2015 sous l’impulsion de Nicolàs “Colacho” Brizuela. Déjà nominé au Latin Grammy Awards, il était l’arrangeur, directeur musical et guitariste de Mercedes Sosa pendant plus de vingt ans. Ils ont enregistré une trentaine de disques ensemble. Comme je le disais, je travaillais avec Nicolàs depuis 2011. Pour cette raison, il était souvent en France et en 2015, lors d’un de ses séjours, sans doute par nostalgie, il avait envie d’entendre des voix faire résonner les mots qu’interprétait Mercedes décédée en 2009. Il a décidé de créer un trio vocal s’accompagnant d’instruments. Il a réarrangé des thèmes sur lesquels il avait déjà travaillé, ou même composé un nouveau thème. Je chante et m’accompagne au bandonéon et à la flûte en ut. A mes côtés, il y a Valentine Jé également aux flûtes et au chant. Patricia Lestre (chant, ukulele, violon) qu’on peut entendre sur le disque est partie suivre son chemin dans son pays le Portugal. C’est Chloé Breillot (Chant, ukulele) qui la remplace. Il n’y a pas de guitare dans le groupe, Nicolas avait envie que le Trio se démarque légèrement des figures tutélaires de ces musiques.
Que signifie le nom du groupe ?
NV : Cela veut dire « Les filles de Famatina ». C’est un clin d’oeil au Mont du même nom, situé dans la pré-cordillère des Andes, dans la province de La Rioja, à 1200 km au nord ouest de Buenos Aires, en Argentine.
Quels sont les rythmes qu’on peut entendre sur cet album ?
Il y a par exemple la chaya, danse de Carnaval, rythme typique de la Rioja (région du Nord-Ouest) et terre de Nicolàs Brizuela. Citons également la zamba, dérivée de la zamacueca péruvienne, entrée par le nord du pays depuis la Bolivie. C’est une danse de couple avec chorégraphie. Le huayno est un rythme péruvien assez enlevé qu’on retrouve dans toute l’aire andine et qui célèbre l’amour, la fête mais aussi la peine. Le chuntuky vient également du nord et serait, à mon avis, une variante du huayno.
La milonga campera qu’on peut entendre « Los Hermanos » (les frères) a été composée par Atahualpa Yupanqui et fait référence aux hommes qui migrent, à leur capacité à se retrouver, et à une soeur que nous avons tous qui est la Liberté. Certaines de ces thèmes, comme « Todo Cambia » (symbole de la lutte pour la démocratie dans les pays sud-américains) ou « Un Son para Portinari » (Loro Salinas) sont très connus. Beaucoup de ces morceaux parlent de la nature et de la dureté de la vie rurale, mais aussi de l’amour et de la fête…
Et comme la musique est un art universel, on peut entendre la kora du Malien Baba Sacko dans la chaya «Luna de carnaval » de Jose Oyola, ou dans « Ki Chororo » de Anibal Sampayo.
Notons aussi la présence de Carine Bonnefoy au piano sur la très belle zamba « La diablera » de Hilda Herrera et Nella Castro, ou de Clément Petit au violoncelle sur « Polleritas ».
*Actuellement, Ninon enseigne également à l’école de langues « Glotte Trotters » et développe le projet du CEREMUSA (Centre de Recherche de Musique et Transmission Orale) situé à Bethon, dans le département de la Marne.
*disque Cuscaias - 2013 - Acqua Records
Entretien réalisé par Frantz-Minh Raimbourg
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Las Famatinas Trio vocal, instrumental de musique argentine Ninon Valder
Las Famatinas, Trio Vocal et instrumental de Musique argentine, fondée en 2015 par Colacho Brizuela. Sous la direction vocale de Ninon Valder.
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