Les lecteurs/lectrices les plus assidu.e.s de La.titudes l’auront sûrement deviné : le Festival des Traversées Tatihou est un évènement qui nous tient particulièrement à coeur *. Cet été, nous étions là-bas pour fêter le 30ème anniversaire de cette manifestation pas comme les autres.
Diaporama de la 1ère Traversée vers l'Île et de la comète d’Aérosculpture (Jean-Pierre David et Christian Thellier). : Photos Frantz-Minh Raimbourg.
Répétons-le donc encore une fois, l’Île de Tatihou, sublime petit bout de terre est accessible à pied par la plage au rythme des marées de fin d’été. Riche d’un patrimoine historique et naturel majeur, elle est distante de deux kilomètres de la commune de Saint-Vaast-la-Hougue au nord-est du Cotentin.
Au fil des ans, les « Traversées », gérées par le Conseil Départemental de la Manche ont bien sûr évolué. Le Chapiteau de Saint-Vaast n’existe plus, les concerts sont répartis maintenant entre l’île, les différentes salles du "Village préféré des Français 2019" (la Scène ouverte sur le Port, la Salle Max-Pol Fouchet, l’Eglise, la Médiathèque, et divers restaurants et cafés), mais également dans différents lieux des communes alentours du Val de Saire (Barfleur, Montfarville, Saint-Pierre-Eglise).
En tout 46 concerts proposés, 343 artistes de 12 nationalités différentes et pas loin de 12 000 festivaliers venus de Normandie mais également d’autres régions et même de l’étranger.
Autre changement depuis quelques années, comme dans beaucoup de manifestations artistiques actuelles, le public n’est plus forcément que spectateur mais devient également acteur à travers différentes propositions : 12 stages de danses, voix et instruments, 2 déambulations, 3 concerts-promenades, 6 sessions irlandaises,1 création chorégraphique avec des habitants du Val de Saire, 4 rencontres avec les artistes (« T’as pas tout dit à Tatihou » avec le journaliste et directeur artistique Franck Tenaille), 5 visites patrimoniales, une balade en vélo et en musique, l’exposition des Flûtes du Monde (Collection de David Hopkins) et une séance de cinéma.
Pour cette édition anniversaire, la Normandie était bien présente, aussi bien sur la Scène ouverte (Como No, Soufflant Manchot, La Banda Jojo, Bul Mazette) que sur l’île avec Le duo Octantrion et d’autres artistes dont nous reparlerons plus précisément un peu plus loin !
Diaporama concerts Cerys Hafana et Cherish The Ladies. Photos : Frantz-Minh Raimbourg.
Mardi 20 août : Après le discours d’inauguration et le joyeux spectacle de rue Jipsian, la première Traversée vers l’île pouvait commencer avec de nombreux fanions de couleurs et l’étonnante comète d’Aérosculpture (Jean-Pierre David et Christian Thellier).
Le chapiteau était prêt pour accueillir le public et la harpiste/chanteuse galloise Cerys Hafana seule sur scène avec son intriguant instrument à trois rangées de cordes.
Puis ce fut le tour du célèbre groupe irlandais féminin formé à New York en 1985 Cherish The Ladies. Sous la direction énergique de la flûtiste Joanie Madden, on a pu entendre des airs traditionnels avec parfois la présence impressionnante de deux danseurs. Un concert irlandais « classique » mais toujours efficace.
Le soir, la salle Max-Pol Fouchet de Saint-Vaast accueillait le duo occitan féminin Cocanha, tandis qu’Alan Stivell démarrait son « Val de Saire Tour » dans l’église de Barfleur plein à craquer. Dans une formule intimiste (« Cœur et Äme » en duo avec Tangi Miossec aux claviers), le célèbre barde breton était sur scène les deux jours suivants à Montfarville puis à Saint-Pierre-Eglise.
Diaporama concerts Octantrion et Canzionere Grecanico Salentino. Photos : Frantz-Minh Raimbourg.
Mercredi 21 août : Soirée contrastée le lendemain à Tatihou avec Octantrion (Eleonore Billy- Gaëdic Chambrier) accompagné de Christophe Piot aux percussions. Cordes frottées (nyckelhaprpa) et pincées (guitare double-manche et cistre) pour un doux et envoûtant voyage vers les musiques scandinaves.
Canzoniere Grecanico Salentino est sans conteste la formation la plus connue de la musique traditionnelle des Pouilles dédiée à la danse de la Pizzica dans le sud de l’Italie. Fondé en 1975 par Daniele Durante, ce septuor est porté depuis quelques années par son fils Mauro. Entre ballades, chants sociaux et tarantelles frénétiques du Salento (avec la danseuse Silvia perrone), CGS fascine par son énergie, des voix superbes, des arrangements somptueux et un sens du spectacle qui fait à chaque fois l’unanimité. On ne se lasse pas de les revoir !
Sur la terre ferme, le groupe mythique des musiques à danser bretonnes Skolvan fêtait ses 40 ans d’existence.
Diaporama concerts Tilo Wachter, Kyrie Kristmanson, Lewis Ewans et la Chorale du Normandy, Mes Souliers sont Rouges. Photos : Frantz-Minh Raimbourg.
Jeudi 22 août : Retour au large en bateau pour les premiers concerts-promenades dans les jardins de l’île avec le virtuose allemand du handpan Tilo Wachter, la déjà nommée harpiste/chanteuse galloise Cerys Hafana et la franco-canadienne « folk-pop baroque » Kyrie Kristmanson. Cette dernière était le lendemain avec son trio à la halle aux Grains du village voisin de Quettehou.
Sous le chapiteau, après une première partie partagée par le chanteur/chef de chœur Britannique et Normand d’adoption Lewis Evans avec sa Chorale du Normandy (Scène de musiques actuelles à Saint-Lô), Mes Souliers sont rouges débarquèrent devant un public conquis d’avance et qui n’a pas hésité à reprendre les incontournables du plus célèbre groupe de la région avec enthousiasme. Frissons et succès garantis.
La fête pouvait continuer un peu plus tard au même endroit avec la fameuse « Nuit de Bals » : 200 danseurs et 5 groupes : Ital Express (Bretagne), Arbatédorne (Vendée), Mbraia (Occitanie), Super Parquet (Auvergne), et la Banda Latira (Asturies) pour une célébration jusqu’à l’aube des danses des régions de France.
En fin d’après-midi, le Trio Maaar (NDLR : entretien avec Elsa Corre et Rebecca Roger Cruz sur ce même site) composé de trois chanteuses et percussionnistes du monde avait rempli la salle Max-Pol Fouchet.
Diaporama concerts Ben Herbert Larue, François Morel, A Filetta. Photos : Frantz-Minh Raimbourg.
Vendredi 23 août : Retrouvailles, toujours à Saint-Vaast, avec les talentueux Jean-Luc Thomas (flûtes) et Gab Faure (violon) (NDLR : entretien avec Jean-Luc Thomas sur ce même site) pour un moment de complicité autour de leur disque « Gwiad ». Puis deuxième jour des concerts-promenades, cette fois avec le grand Steve Waring (qu’on reverra le lendemain en quintet familial dans un spectacle tout public) et deux duos de musique irlandaise : Paddy Tunney/Damian Walls et Mairéad Walls/Guillaume Hugot.
Grande fête autour de la chanson française sous le chapiteau dans la soirée avec d’abord le poète Ben Herbert Larue, dans la lignée d’un Allain Leprest et du « Grand Jacques » (Brel). Belle découverte.
Natif de Flers dans l’Orne, le comédien, réalisateur, chroniqueur et chanteur François Morel nous a offert un fort beau spectacle tout en équilibre entre humour et émotion, accompagné entre autres de son fidèle complice Antoine Sahler. Dans une première partie, l’artiste a repris des titres de l’album « La Vie. Titre provisoire », puis entouré des musiciens de la Kevrenn An Daou Loupard (Bagad de Vire / Saint-Lô) et du Chœur des marins du Cotentin, il a chanté une partie de son dernier opus autour des textes du poète et marin breton Yves Marie le Guilvinec, dont le désormais célèbre « Tous les marins sont des chanteurs ». Un régal !
La journée n’était pas finie puisque qu’à l’église de Saint-Vaast, nous avons eu la grande joie de retrouver l’Ensemble vocal corse A Filetta accompagné de la guitariste classique Sandrine Luigi. Un moment plein de grâce.
Diaporama concert Carlos Núñez (et invité.e.s). Photos : Frantz-Minh Raimbourg.
Samedi 24 août : Pendant que Parveen et Ilyas Khan enchantaient ce même lieu avec leur musique traditionnelle de l’Inde revisitée, les dernières balades musicales dans les jardins de Tatihou avaient lieu avec Jean-Luc Thomas et Gab Faure (chacun en solo) et le duo de musiques irlandaises Martial Benoit / Anthony Picard.
Beaucoup de monde pour le dernier concert évènement sous le chapiteau. Inspiré par le 30ème anniversaire des « Traversées » et les 50 ans de Brittany ferries (NDLR : « Celtic Sea », son dernier album a été réalisé en partenariat avec la compagnie maritime), Carlos Núñez va offrir aux spectateurs un moment de partage unique et inoubliable en deux parties. Accompagné d'abord par ses musiciens Xurxo Nunez aux percussions et à la programmation, Pancho Alvarez à la guitare, Jon Pilatzke au violon ou aux claquettes et Itsaso Elisagoien à l'accordéon, le musicien nous emmènera faire un beau voyage musical de la Galice à l'Irlande en passant par la Bretagne, le Pays de Galles et l’Ecosse. Dans un second temps, le célèbre flûtiste et joueur de gaïta invitera les Corses d’A Filetta et des musiciens normands à le rejoindre sur scène. On pourra ainsi entendre le violoniste Etienne Lagrange (fondateur de l’association la Loure) avec ou sans son complice du groupe Lihou James Dubleton (NDLR : CD « Réveillez-vous car il est jour. Musiques traditionnelles des îles anglo-normandes ») et Chloé Richard-Desoubeaux (musicologue et violoniste). Le concert se terminera par un andro joué avec toute la troupe et dansé par le public dans les allées du chapiteau et sur la scène.
Après ce moment hors du temps, l’ultime traversée et le retour vers la terre ferme se fera en compagnie de la comète lumineuse d’Aérosculpture et la fanfare de la Banda Jojo sera là sur le quai du port pour accueillir chaleureusement le public fatigué mais heureux.
Dimanche 25 août : Dernier jour, mais encore de bons moments avec entre autres le bal d’Antan de Bul Mazette sur la scène ouverte et les Ecossais de Ménestrel à la salle Max-Pol Fouchet.
Rendez-vous pour la 31e édition qui se tiendra du 9 au 13 août 2025.
Article réalisé par Frantz-Minh Raimbourg.
*Lire sur ce même blog les comptes-rendus de Traversées Tatihou 2017 et 2022.