M' Toro Chamou.

Publié le par Raimbourg Frantz-Minh

Entretien avec l’incontournable auteur/compositeur/interprète mahorais à l’occasion de la sortie de son dernier album.
Photo: Olivier Urbanet.

Photo: Olivier Urbanet.

Racontez nous votre « jeunesse musicale » !
Je suis né en 1974 à Dzaoudzi, sur Petite-Terre, une des îles qui constituent Mayotte, dans l’archipel des Comores. Mon nom est  Chamsidini Momed aka. M’Toro Chamou, mon nom d’artiste signifie "sauvage" ou « Marron », du nom des anciens esclaves révoltés. Mon grand-père maternel jouait du tambour et chantait le chigôma, une danse de mariage et de cérémonie. Chez nous, la musique, les rythmes traditionnels font partie intégrante de notre culture et de notre quotidien. A la maison, grâce à mon père qui passait son temps de loisirs à réparer des tourne-disques et des radios, il y avait de la musique en permanence. Aussi bien celles des îles de l’océan Indien et des côtes africaines voisines (Kenya, Mozambique, Somalie, Tanzanie,…) que Bob Marley et les vedettes de la chanson française. J’ai commencé la musique à l’âge de 12 ans. Pendant mon adolescence, un ami musicien africain m'a offert ma première guitare et  j’ai formé un combo hip hop du nom de M’Tsapéré Power. C’était la première formation de ce genre à Mayotte (sourire). Plus tard, je suis allé à la Réunion, puis, je me suis installé en France, d’abord à Marseille puis successivement à Paris, Brest et Nantes. Au milieu des années 1990, j’ai joué entre autres avec Baco et Mikidache, les pionniers de la musique mahoraise à l’étranger. C’est pendant cette période que j’ai  tout naturellement commencé à donner forme à mon répertoire.
Paris. Juillet 2017. (Photo: Patrice Dalmagne)
Paris. Juillet 2017. (Photo: Patrice Dalmagne)

Paris. Juillet 2017. (Photo: Patrice Dalmagne)

Votre premier album (Kaza N’goma) date de 1998 ?
Tout à fait. Il y a eu ensuite Retour aux sources (1999) avec le titre Bombo qui donnait à ma musique une orientation proche du “mgodro” traditionnel mahorais, semblable au salegy malgache et au maloya réunionnais.
Que s’est-il passé ensuite ?
En l’an 2000, j’ai rencontré le manager du groupe IAM. J’ai participé à plusieurs évènements musicaux entre Paris et l’Océan Indien avant de revenir habiter à la Réunion en 2012.
Quels sont les thèmes de vos chansons ?
On peut dire que je suis un chanteur « engagé ». Je raconte le mal du pays, la situation des enfants des rues et des immigrants clandestins venus chercher fortune à Mayotte, mais je parle aussi d’amour, d’espoir, de la sagesse des anciens. Dans M’Lango (“la Porte” en shimaoré ou mahorais), paru en 2002, certains titres abordent l’envie d’un monde plus juste, le besoin de compassion, toujours sur des rythmes du mgodro, comme le suivant sorti en 2004 (Bwé Foro) qui propose également des balades et  du reggae.
En 2009, j’ai enregistré Changer, une galette interprété en shimaoré, en kiswahili (langue du peuple Swahili) et en français, un EP 4 titres Mgodro Street deux ans plus tard et Punk Islands en 2016, un disque « coup de poing » sur l’avenir incertain de Mayotte et les divisions avec les voisins de l’Archipel.r
Paris. Juillet 2017. (Photos: Patrice Dalmagne)
Paris. Juillet 2017. (Photos: Patrice Dalmagne)

Paris. Juillet 2017. (Photos: Patrice Dalmagne)

Parlez nous du collectif Tsenga !
En 2008, avec mon compatriote Mikidache dont j’ai déjà parlé, nous avons fait paraître un opus en duo (Tsenga) en  hommage à Langa, le maître du gabousi (luth mahorais qui symbolise la tradition musicale de Mayotte). Deux ans plus tard, un des concerts de la tournée du collectif (Mikidache, M’Toro Chamou, la compositrice/chanteuse/chorégraphe  Zainouni, le rappeur Bo Houss et Eliasse, lauréat 2010 des “Voix de l’Océan Indien”) a été enregistré en public (Tsenga 2. Live Chiconi 2008). En 2011, il y a eu également un EP 5 titres avec un reggaeman Comorien.
Photo: Lechat Ronan.

Photo: Lechat Ronan.

Et le petit dernier Sika Mila (Le Cri de l'Océan Indien/InOuies Distribution/Believe Distribution) ? 
Il est peut-être plus léger et moins directement revendicatif que le précédent, même si son titre signifie : « Préserve ta culture » !. La musique est en équilibre une nouvelle fois entre la tradition, les rythmes mgodro, chigôma, Chengué et des sons blues, rock et reggae plus actuels. Les percussions mahoraises telles que les taris et le n'goma côtoient l'harmonica, le banjo et les guitares électriques. 
                                  Entretien réalisé à Paris par Frantz-Minh Raimbourg

 

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